Musée Rude – 8 rue Vaillant

Les aléas et les gloires de l’histoire dijonnaise se concentrent en un lieu dont le culte est désormais dédié aux Beaux-Arts.

Au Ve siècle, suite au saccage de Langres, siège épiscopal, Dijon accueille un groupe cathédral, dont l’église Saint-Etienne établie sur les fondations du rempart gallo-romain, le castrum, édifié vers 270 pour protéger « Diviomagus » (Antique Dijon) des invasions barbares.

Au XIIe siècle, Saint-Etienne devient une riche et importante abbaye dont l’église sera reconstruite plusieurs fois au cours des siècles jusqu’à devenir un temps, de 1731 à 1789, cathédrale.

Désaffectée en 1792 devenant Halle aux blés, bâtiment municipal, bourse et chambre de commerce, c’est depuis 2009 le centre administratif culturel de la ville qui regroupe le pôle documentaire, la conservation, le service des publics, l’administration du musée des beaux-arts, la Société des amis des Musées de Dijon ainsi que la bibliothèque municipale de prêt adultes du centre-ville.

Un ensemble appelé « La Nef » en référence à son emplacement dans l’église Saint-Etienne dont chaque espace, malgré les transformations, a été préservé pour offrir au public un large éventail de l’histoire et des gloires dijonnaises.

Ainsi le choeur permet de brasser du regard quelques siècles d’architecture, des restes du castrum du IIIe siècle dont on mesure la largeur, jusqu’à la crypte du XIe siècle dont on perçoit encore les bases de l’ancienne élévation.

Quant au transept, il a été aménagé en 1947 pour accueillir le moulage du « Départ des Volontaires de 1792« , communément appelé « La Marseillaise« , célèbre sculpture réalisée par François Rude sur le pied droit de l’Arc de Triomphe de l’Etoile à Paris.

Ce haut relief impressionnant, incrusté dans la voûte de l’édifice sacré, répond à d’autres moulages dont les oeuvres originales sont conservés au musée des Beaux-Arts, malheureusement mises au secret jusqu’en 2019, date prévue pour l’achèvement des travaux de rénovation des salles dédiées à l’art moderne.

D’ici là le musée Rude est la seule occasion de découvrir la virtuosité technique d’un artiste hors du commun.

François Rude est né le 4 janvier 1784 à Dijon, il entre dès 1800 à l’Ecole de Dessin de François Devosge pour suivre un enseignement fondé sur le dessin et le modelage d’après l’antique et le modèle vivant.

En 1807 recommandé par son maître auprès de Vivant Denon, directeur des Musées impériaux, François Rude quitte sa ville natale pour Paris.

Il fréquente quelques ateliers d’artistes avant d’être admis à l’Ecole impériale des Beaux-Arts en 1809 et d’obtenir le premier prix de Rome en 1812 avec « Aristée déplorant la perte de ses abeilles« .

Un thème classique, annonciateur des prochains tourments de l’Histoire qui ont amenés Rude, à la chute de l’Empire, à s’exiler avec son protecteur dijonnais, Louis Fremiet, à Bruxelles.

Ce n’est que 12 ans plus tard, en 1827, à son retour définitif à Paris qu’il affirme un talent qui le désigne comme l’un des principaux sculpteurs de sa génération.

Le sens de l’esthétique classique, la modernité de certains de ses sujets (« Le Petit pêcheur napolitain » – salons de 1831 et 1833) et une exaltation des gestes et des regards historiques l’amènent à réaliser son chef-d’oeuvre, cette « Marseillaise » sculptée qui emprunte à l’antique les costumes de ces héros révolutionnaires à l’expressivité romantique.

Rude apporte à ses réalisations une force vivante qui nous entraîne, même sans connaitre la personne ou le sujet représenté, dans un mouvement, dans un élan communicatif.

Le Maréchal Ney – 1838 – Plâtre (surmoulage)

Comment ne pas vouloir suivre la fougue du Maréchal Ney, comment ne pas entendre les voix qui résonnent dans le regard écarquillé de Jeanne d’Arc ?

Jeanne d’Arc écoutant ses voix – 1845 – Plâtre (surmoulage)

Les oeuvres de Rude renvoient à la nature humaine, à ses motivations, ses émotions, ses actions, qui font de l’artiste le grand maitre du romantisme sculpté dans le monument national.

Le lieu est réduit, la poussière du temps apporte une jeunesse à essuyer les plâtres mais quelle puissance extraordinaire ne renferme t-il pas !

Rude y gagne un hommage de sa ville en un concentré d’inspiration, de sublimation et de glorification d’une Histoire de France qui vous éclate en plein regard.


Musée Rude – 8 rue Vaillant – Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 10 h à 17h – Entrée gratuite comme dans tous les musées de la ville de Dijon

Destin d’une brindille

Un retour aux sources est souvent la voie la plus naturelle au destin d’une brindille, exit Dijon et bonjour Chambolle-Musigny, un havre de paix dans la maison de l’ancienne cure (4B rue de l’église) propice aux projets, cueillettes et ateliers, même si une part de la ville demeure dans la morale de l’histoire à suivre…


Pollution, klaxons, empressement et violence plus ou moins sous-jacente sont le quotidien des villes où le peu de temps gagné par l’incivilité fait perdre l’essentiel…

Un monde de nature, de culture aux racines de nos origines qu’il faut sauvegarder pour ne pas s’oublier à jamais dans le rythme implacable d’une évolution à marche forcée qui n’apporte pas toujours la félicité.

Aussi, quelquefois, pousser une porte vous entraîne dans un monde parallèle ou l’important n’est pas d’avoir mais d’imaginer, de pénétrer dans un univers magique ou les cueillettes immémorables donnent corps aux contes de l’enfance et à ceux que certaines fées modernes inventent encore et toujours…

DESTIN D’UNE BRINDILLE

Estelle au destin tout tracé par ses parents inquiets de l’avenir, ne voyait dans le droit qu’une géométrie implacable où les sentiers battus immuables ne se trouvent entourés que d’angles affutés, gardes sans folie des âmes rêveuses.

Pourtant, un jour, le long d’une avenue à la rigueur hausmanienne, dans cet univers mineralo-bitumeux, une minuscule pensée blanche attira l’attention de notre héroïne.

Cette fleur était le symbole d’une vie, certes fragile, mais assez forte pour s’imposer dans un environnement a priori hostile.

Une leçon majeure de volonté afin d’échapper à cette règle implacable : L’ordre est d’or et l’épanouissement manque d’argent !

Pourtant ! Pourtant, quoi de plus important ? Réussir véritablement ne serait-il pas réussir son retour aux sources ? Appréhender sa vie en passion, en savoir-faire, en conscience manuelle, intellectualisme du geste ?

Tout quitter pour les forêts de Pontarlier, respirer, s’inspirer, imaginer au milieu des sapins aux souvenirs enfantins et de certains feuillus dont les branches fiérement dressées abandonnent quelquefois un peu d’eux-même au service des fées.

Ne rien arracher, ne rien couper, simplement récolter et c’est ainsi qu’Estelle découvre une brindille au destin singulier :

Dernière née d’un père plus que centenaire, c’est lors d’une tempête d’hiver qu’elle se décida à se détacher de la sève familiale, trop rigide et tortueuse pour une brindille dans l’air du temps…

… s’offrant tour à tour au mistral, tramontane, sirocco, libeccio, autant et levant, elle atterrit voici 50 ans en couverture des magazines, silhouette longiligne et triste mine du Swinging London, pour encore s’échapper, s’envoler et enfin revenir, desséchée auprès de ses parents.

Tout était dit jusqu’à cette rencontre fortuite lors d’une chasse végétale : baies, fruits défendus, mousses, lichens, lierre, pommes de pins, peau de bouleau et fleurs pétrifiées d’être desséchées… immortelles.

Une fois dans l’atelier, Estelle scie, soude et structure sa récolte nature, sublimant ce que beaucoup voyaient comme insignifiant.

Naissent alors cages à oiseaux, princesses, bracelets et couronnes d’ingénues, jardins de souvenirs, vitrines enchantées et compositions variées pour hôtels distingués, grands horlogers, banquets et jeunes mariés.

Une sortie de route salvatrice en chemins de traverse inspirant une autre façon d’appréhender le monde dont Estelle diffuse par une série d’ateliers la simplicité des éléments et la beauté du geste.

Une thérapie de l’art originel qu’elle a exportée jusqu’au Japon et un goût de faire par soi-même dont les petits secrets seront bientôt dévoilés dans un livre à sortir en avril prochain.

Une atmosphère à part où l’humain renoue avec la nature, comme Estelle et la brindille, dans une métamorphose avide de liberté, union parfaite, intime communion, qui invite à vous demander : Dis-je on ?


Estelle Meunier, végétal designer : http://www.destin-brindille.com