L’excellence n’a pas (toujours) besoin d’immensité, ainsi cette boutique est un espace réduit qui séduit de prime abord.
Les yeux mis-clos, narines dilatées, laissez-vous aller à vagabonder…
Entre liquide, poudre et cire, les textures sont offertes à vos désirs de voyages inhalés.
Rien d’illégal, tout est permis, et cette Belle Parfumerie, acte de propriété et de fierté mêlées, saura vous fournir des objets de dévotion, à l’être aimé, à vous-même, ou à votre home sweet home.
Un peu éloignée des artères principales nous sommes ici dans la parfumerie de niche, dans la tradition française de la Grande Parfumerie.
Un univers intimiste qui oblige à certains sacrifices.
Quittez donc les allées des hypermarchés de la beauté, feuilletez, avec discernement, les magazines aux publicités retouchées, et, surtout, ne rêvez plus d’une belle vie à l’exclamation de Julia Roberts & Co.
Ici, dans la réalité, Baudelaire vous invite au voyage : « Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté. »
« Les plus rares fleurs / Mêlant leurs odeurs / Aux vagues senteurs de l’ambre »
Attention au départ, Caroline est votre hôtesse pour 9 destinations inoubliables.
En ces derniers jours d’hiver, vous révez de chaleur et de Dolce Vita ?
Direction ACQUA DI PARMA, une maison artisanale centenaire, d’abord masculine qui, dans l’air du temps, a cédé aux questions de genre.

Mixte, frais, ensoleillé, prenez en terrasse un soupçon de « Colonia« , un classique aux multiples dérivés, à l’esprit chic et intemporel d’une cologne citronnée bullée de savon piquant.
Aprés un bain de Parme, si nous corsions les choses ?
Destination PARFUM D’EMPIRE, où Marc-Antoine Corticchiato, en vrai ressortissant de l’île de beauté, aime à surdoser les parfums, bonne tenu (militaire ?) exigée pour champ de bataille intime.

Fougére Bengale aux extraits de cigare à la bouche et de peau chauffée, et surtout Yuzu Fou, un citron japonais, presque confit, trés trés frais… parfait parfum d’empire des sens !
Ce soir ou jamais !!!
Une invitation express d’ANNICK GOUTAL à ne pas refuser.

Retour sur le continent pour découvrir une maison plus féminine (Mais pas que !), proche de la nature, romantique, aux belles histoires et aux 40 parfums doux et frais.
La nouvelle sainte de Dijon s’énivre d’Encens flamboyant, et le bel Antinoüs déclame, de son haleine hespéridée, l’hommage de Marguerite Yourcenar à la mémoire de son empereur-amant. (Les Nuits d’Hadrien, pour faire simple)
Prochaine étape : immobile !
Asseyez, feuilletez, inspirez !
Si l’odeur d’une madeleine a pu donner l’un des chefs-d’oeuvre de la littérature française et mondiale, la réciproque est aussi possible.
JARDINS D’ECRIVAINS est l’oeuvre d’une liseuse compulsive. Anaïs Biguine dévore, digére et distille, en eau de parfum, l’odeur spirituelle des écrivains ou de leurs héros.

Gigi (Colette) est une innocente à l’herbe fraiche coupée qui se coule petit à petit dans son environnement naturel de tubéreuse, musc blanc et bois de santal trés féminin.
Junky (William S. Burroughs) est un héroïnomane assagi aux véritables extraits de cannabis (Thérapeutique ?)
Et Wilde, un irlandais propret aux notes de thé dont les amours anté-victoriennes le tourne vers les boutonniéres de fleurs blanches capiteuses et d’oeillet vert.
Dans la même veine, Gérald Ghislain a créé HISTOIRES DE PARFUMS.
Où les chiffres, plus historiques que mathématiques, se font olfactifs.
1804 ? Début du 1er empire !
Pas tout à fait ! Plûtot la naissance d’une féministe orientale florale (George Sand)

Et ainsi de suite… 1828 (Jules « Boisé hespéridé » Verne), 1740 (Donatien « Boisé chypré » de Sade), 1873 (Colette ; fem. hespéridé gourmand)…
La page est tournée !
Même si quelquefois les parfumeurs ressuscitent les morts littéraires et en font des héros 2.0 (Ou juste des zombies qui veulent sentir bon ?) :
Attention – JULIETTE HAS A GUN !

De Vérone à Londres, la gentille Juliette a largué son Roméo pour une rebelle attitude. En anglais dans le texte, elle déclame « Not a perfume » pour nous déstabiliser, se présente à l’élection de Miss Charming et pousse des MMMM…
« L’amour est une fumée formée des vapeurs de soupirs »
Laissons vagabonder ce noble sentiment dans son écrin naturel. Direction Paris !
De notre précédente escale dans le sofa, entouré de créatures de papier, nous retrouvons une héroïne de JARDINS D’ECRIVAINS : La Dame aux camélias.

Avec son flacon poire cette délicate horizontale se parfume d’une cologne de nuit (…) qui embaume le corps des amoureuses, et de leurs partenaires.
Odeur de draps, de déshabillé, d’une peau de désir, qui n’a rien à envier à ses petites-filles dans le métier, LES COCOTTES DE PARIS.

La Castiglione est chyprée, alliance d’ambre, de cédrat et de réglisse, capable de séduire un roi (De Savoie puis d’Italie) et un empereur aux belles bacchantes.
Mlle Cléo (De Mérode) est épicée, entre coton, litchi et ylang-ylang, séductrice du roi des Belges, et de bien d’autres, héroïne de cartes postales distribuées à sa beauté.
Enfin, la Belle Otéro est fleurie, gentille violette, envoutant santal qui charma le roi d’Angleterre et le cinématographe naissant.
Faites votre choix !
Ces icônes des fastes du second empire, et de la Belle Epoque, marquent aussi l’émergence du luxe à la française et de l’affirmation féminine.
Aujourd’hui TERRY DE GUNZBURG incarne cette attitude, affranchie de l’argent de ces messieurs.
Un talent pur au service de la beauté et particuliérement du maquillage qui l’a vu oeuvrer auprés de monsieur Saint Laurent, pour ses collections de Haute Couture, avant de créer sa propre collection « By Terry« .
Une ligne aux couleurs riches et aux soins mélés, à la texture fine tout en étant bien pigmentée, que vous retrouvez à la « Belle Parfumerie », à la vente et en maquillage sur mesure.
Depuis 2012 Terry est passée aux parfums, avec la même exigence.
Une élégance intemporelle, sophistiquée, très, très chic.

Offrez un énorme bouquet de fleurs avec Rose infernale, aux notes épicées, ou encore Fruit défendu, qui porte en lui les couleurs d’une affolante tentation (…).
Derniére étape de notre voyage, vers un quartier parisien qui ressemblerait à St-Germain des Prés, entre librairies rares et maisons de luxe galopantes.
Les éditions de parfums FREDERIC MALLE représentent depuis 2000 les meilleurs parfumeurs d’aujourd’hui et d’hier, une véritable Pléiade olfactive, où le Nez est un artiste à part entiére, de la création à la signature.

En 16 ans, 22 parfums sont nés de ces collaborations, où le compositeur méle la sensibilité des accords au lyrisme des noms :
L’eau d’hiver de Jean-Claude Ellena est composée comme une aquarelle, de la transparence des agrumes à la douceur du miel, l’écriture olfactive est limpide et minimale.
Portrait of a lady de Dominique Ropion, est un best seller baroque, symphonique et somptueux, alliant un fort dosage de rose turque aux musc, patchouli et encens.
Comme le dit l’auteur : « Un parfum mi-robe du soir, mi-conte des mille et une nuits« .
C’est ainsi que le voyage s’achéve pour un retour en douceur à Dijon et particuliérement dans cette « Belle parfumerie« , boudoir de voyages concentrés, où Caroline, formée à la parfumerie à Lyon, sera à même de vous conseiller pour trouver votre (ou vos) alter ego olfactif.
Ces 9 maisons de parfum offrent un choix de qualité, un soupçon d’exceptionnel et d’originalité, éloigné des sirénes du merchandising de masse.
Méfiez-vous, la parfumerie de niche est un plaisir dangereux, quand on y a gouté on ne peut plus s’en passer.
Et même si les prix peuvent sembler plus élevés, remplacer son eau de toilette par une eau de parfum bien concentrée, et attachante, rend la folie raisonnable.
Personnellement mention spéciale à Wilde de JARDINS D’ECRIVAINS et à l’eau d’hiver de Jean-Claude Ellena pour FREDERIC MALLE.